Un médecin généraliste de Belfort alerte sur le danger que représente le manque de lits pour les patients

Le docteur Luc Griesmann constate amèrement que plusieurs de ses patients auraient pu perdre la vie à cause des tensions qui frappent les urgences dans le Nord Franche-Comté.

« J’ai des pertes de chances. » Dans son cabinet, à Belfort, le docteur Luc Riessman pose un constat froid : on met en danger la vie des gens et de ses patients. Selon lui, les conditions de prise en charge de certains patients sont ubuesques. Et la cause est simple : des hôpitaux étranglés par les baisses d’effectifs, la réduction du nombre de lit, et la désertification médicale qui vient engorger les services des urgences. « Ce n’est évidemment pas la faute des soignants qui n’y sont pour rien, mais désormais, l’hôpital est débordé pour un ongle incarné, regrette-t-il*. Il y a une baisse de la qualité de la prise en charge. »*

Des patients mal soignés voire refoulés malgré un diagnostic inquiétant

Il partage l’expérience de plusieurs de ses patients qu’il a redirigés vers l’hôpital, avec un diagnostic déjà posé mais qui ont dû passer de longues heures, seuls sur un brancard, sans aucune surveillance, avant de finalement pouvoir être pris en charge. D’autres, doivent être envoyés plusieurs fois aux urgence avant d’enfin être acceptés. « J’ai un patient qu’il a fallu adresser trois fois aux urgences pour qu’il puisse recevoir des soins, explique-t-il. Une première fois par une infirmière, la deuxième par moi, et la troisième par une assistante médicale. Il avait une hémorragie digestive et une septicémie entre autres, mais il a fallu s’y reprendre à trois fois. Derrière ça a donné lieu à 1 mois et demi d’hospitalisation, ça aurait pu être beaucoup moins. »

23 heures sur un brancard avant d’être prise en charge

Il est particulièrement énervé par le cas d’une dame de 91 ans qu’il a envoyée aux urgences avec une hémorragie méningée, un hématome de près de 3 centimètres dans le cerveau. Son pronostic vital était engagé. Selon lui, elle a dû attendre presque 24 heures sur un brancard à l’hôpital Nord Franche-Comté avant d’être hospitalisée, car le service neurologique de Besançon ne pouvait pas la recevoir.

Marie-Christine, la fille de cette dame, ancienne secrétaire médicale à l’hôpital, est encore en colère après ce qu’il s’est produit : « J’ai pu passer seulement une heure avec elle, je la voyais qui s’inquiétait. Je me suis dit ‘mais ma maman, elle va finir sur ce brancard’. Franchement j’ai cru qu’elle allait avoir ses dernières heures là. Je ne comprends pas qu’il puisse y avoir aussi si peu d’humanité. Ayant travaillé à l’hôpital, c’est quelque chose qui ne devrait pas exister ». Finalement, sa mère a pu s’en sortir après plusieurs jours passés en soins intensifs.

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