Toulouse : Comment un groupe de seniors imaginatifs envisage de vieillir ensemble, loin de l’Ehpad

CHEMIN DE TRAVERSE A Toulouse, des seniors ont décidé de prendre en main leur cadre de vie, et même de mort, en achetant une propriété où passer ensemble leurs vieux jours. Aux antipodes des Ehpad et des résidences lucratives

  • A la fin de la décennie les « boomers » représenteront un tiers de la population française, selon l’Insee. Il y aura 5 millions de plus de 85 ans.
  • A Toulouse, un groupe de seniors fermement décidés à ne pas finir leurs jours dans un Ehpad ou une résidence spécialisée a monté une association.
  • L’idée est d’acheter une belle demeure, « un habitat groupé » dans la campagne, où ils auront leurs appartements privés tout en partageant des moments, agréables ou plus difficiles.
  • Ces « vieux » sont persuadés que l’anonymat des structures d’hébergement et la solitude accélèrent la dépendance. Ils choisissent une autre voie.

Un endroit où « personne ne vient frapper à la porte parce que c’est l’heure du petit-déjeuner », qui ne ferme pas à heure fixe le soir, où l’on peut choisir soi-même le créneau pour son cours de gym adaptée. « Une belle demeure », avec des appartements individuels de 60 m2, « un parc arboré et paisible », dans la campagne toulousaine mais quand même tout près d’un petit bourg, et avec des compagnons de vie, avec qui discuter, débattre ou tout simplement manger le dimanche.

Voilà, tracé à grands traits, le lieu où Marie Clérivet et Roland Bugat envisagent de vivre leurs vieux jours, « jusqu’au bout du quai ». A des années-lumière d’un Ehpad, « où les toilettes ne sont plus mixtes, ce qui en dit long sur la façon dont on considère les vieux », ou d’une résidence senior lucrative montée par des investisseurs. Une utopie ? Pas tout à fait. L’association Egrégore a vu le jour au début de l’année et a presque rempli virtuellement sa future propriété, avec « six membres très motivés » et une douzaine de membres en tout, prêts à intégrer la future Société civile immobilière (SCI), quitte, pour certains, à vendre leur maison, .

« Ne pas mourir cernés de blouses blanches »

Car l’idée, au-delà de maîtriser complètement son cadre de vie est aussi d’en être propriétaire. « Les statuts sont quasiment prêts », assure Roland Bugat, le président. En tant qu’oncologue, le septuagénaire est persuadé « qu’on médicalise trop la fin de vie » et « qu’il ne faut pas mourir cerné de blouses blanches ». Marie Clérivet, sa compagne à la ville, a dirigé pendant vingt ans un service d’aide et de soins à domicile. Ils sont bien placés pour savoir que la « solitude fragilise » et accélère la perte d’autonomie.

Egrégore s’appuie aussi Ostalada, une start-up toulousaine spécialisée dans l’habitat participatif. Ses cofondatrices, Cécile Alliot et Pauline Loiseau, sont là pour le montage juridique et l’animation des débats avant le grand saut. Pour dire par exemple si l’idée « d’une voiture électrique pour tout le monde », prônée par Roland, est réaliste ou si celle de Marie, de faire venir une psychologue deux fois par semaine tient la route.

700 euros de charges mensuelles

Selon les calculs de l’association, le projet nécessiterait 270.000 euros d’investissement de départ par personne. Puis, entre le partage des factures de chauffage et les « circuits courts » pour les courses, « environ 700 euros de charges mensuelles par personne ». « Tout à fait conforme au revenu d’un retraité moyen », affirme Cécile Alliot.

« C’est notre projet, mais il peut aussi être adapté à d’autres lieux, d’autres bâtiments, d’autres revenus », souligne Marie.  « Tant qu’il y a de l’espoir, il y a de la vie », ajoute, philosophe, Roland, qui veut « réveiller les vieux ».

Les membres d’Egrégore se laissent jusqu’à l’été prochain pour trouver et acheter le bien idéal. Ils espèrent tous pouvoir y « poser les valises en 2024 ». Pour vieillir « avec plaisir » sans devenir un résident anonyme.

Contact : amarieclerivet@gmail.com

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